Bernard Deschamps a fait un rappel historique de la colonisation comme de la révolution algérienne et de la guerre d’indépendance qui au prix d’un million de morts, un dixième de la population, a permis de construire une Algérie indépendante, avant de donner son avis sur l’actualité de l’Algérie, à partir de son livre récent « Chroniques Algériennes 2020-2024 ».
Pendant la période Ben Bella-Boumedienne, c’est une incroyable avancée de l’Algérie, construisant son système éducatif, de santé, énergétique après plus d’un siècle d’une colonisation qui ne profitait qu’à la France et ne permettait pas le développement de l’Algérie. En 1961, seulement 10% des enfants sont scolarisés !
La constitution de cette nouvelle Algérie affirmait construire le socialisme. Après la mort de Boumedienne, la période Chadli a été une forme de restauration du capitalisme, en espérant bénéficier des investissements étrangers, mais ne provoquant qu’une paupérisation de masse qui a été le terreau de l’islamisme, jusqu’à la victoire au premier tour du FIS en 1991 et l’intervention de l’armée pour sauvegarder le régime algérien.
C’est une décennie noire qui suit, 200 000 morts provoqués par le terrorisme islamiste. Après la démission de Chadli, un comité provisoire se met en place en allant chercher un des dirigeants de la révolution algérienne, Boudiaf, qui sera assassiné rapidement. Bouteflika assurera la présidence pendant 4 mandats, après avoir organisé la fin de la guerre civile et rétablit la paix, assurant la continuité de la diplomatie algérienne. Quand il tente malgré la maladie de demander un 5e mandat, les protestations populaires sont massives, avec le Hirak, et il doit finalement passer la main.
Tebboune remporte ensuite une élection marquée par une très forte abstention et seulement 6 millions de voix, mais est renouvelé en 2024 en gagnant 2 millions de voix et une abstention toujours forte mais en recul. Il tente de préserver les acquis du « socialisme » de Boumedienne, tout en ouvrant l’économie aux investissements étrangers, réformant la loi du 49/51 qui impose des capitaux locaux dans tout investissement étranger. Il affirme la position géopolitique forte de l’Algérie en prenant des initiatives face à l’occident, en soutien à la Palestine.
Beaucoup de questions ont suivies, sur la mort de Boudiaf, sur le régime algérien, le rôle de l’armée, l’autoritarisme, le développement, les polémiques avec la France, le sahara occidental, et aussi sur la difficulté à dire la vérité en France sur ce qu’a été le colonialisme, sur l’enjeu des mémoires et l’échec de la « commission d’historiens » mis en place par Macron…
Sur ce dernier point, Bernard est très direct, surprenant certains. Il critique le discours du très médiatique Benjamin Stora, représentant en France quasi officiel de la mémoire algérienne, qui dit qu’il faut que chacun y mette du sien pour construire une mémoire commune. Bernard s’oppose à ce qui met sur le même plan le colonisateur et le colonisé. Pour lui, la France doit sans tricher et sans contrepartie reconnaître la violence, l’injustice de la colonisation. Il ne s’agit pas de faire des excuses, mais de reconnaître la responsabilité historique de la France coloniale. C’est la condition pour ouvrir une nouvelle ère de coopérations entre deux pays qui ont beaucoup en commun, des familles comme des intérêts.
Beaucoup d’autres sujets abordés, comme le geste des sportifs algériens aux jeux olympiques jetant des fleurs dans la Seine, là où des centaines de manifestants algériens pacifiques ont été massacrés le 17 octobre 1961. Bernard s’étonnera que personne ne lui parle des « influenceurs », et nous n’avons pas eu le temps de parler des BRICS…
Tout le monde était très content de cette rencontre dans un contexte médiatique très violent contre l’Algérie et la communauté algérienne en France. Comme toujours, les médias d’extrême-droite font tout pour diviser, utilisant des OQTF d’influenceurs pour stigmatiser la communauté algérienne en France. Il est important de multiplier partout les rencontres pour refuser l’escalade des confrontations et défendre l’importance de véritables coopérations entre les deux pays.
Mais une très belle soirée, et nous attendons avec impatience le film des jeunes Vénissians après leur voyage à Alger et Sétif sur les traces d’Annie Steiner. Michèle Picard les invitera en fin de discussion à prendre la parole pour parler de leur voyage et annoncera que l’inauguration du futur équipement « Annie Steiner » se tiendra fin Août…
